La célébration des 50 bougies de la Place des Arts s’achève, tout comme l’année 2013. N’allez pas croire que ce billet est l’éteignoir de la fête. Au contraire, il souhaite mettre en valeur un patrimoine artistique méconnu, héritage de ce chantier qui a transformé Montréal au nom des arts.

La construction de la Place des Arts, inaugurée le 21 septembre 1963 a suscité des controverses et entraîné la démolition d’édifices du centre-ville à valeur historique dont l’ancien Institut Nazareth, première école spécialisée pour aveugles au Canada. Cette « rénovation urbaine » a aussi fait disparaître des cabarets, des bâtiments résidentiels, de grands arbres de même que le bel édifice Kellert à sept étages.

Fondé en 1861 par le Sulpicien Benjamin-Victor Rousselot avec la collaboration des Sœurs grises de Montréal, l’Institut Nazareth a procuré un enseignement de qualité aux personnes aveugles. L’école installée au 95, rue Sainte-Catherine Ouest, entre les rues Saint-Urbain et Jeanne-Mance y est demeurée jusqu’en 1930, année de son déménagement sur le chemin Queen-Mary.

Trente plus tard, un s.o.s. est lancé pour tenter de préserver les œuvres de la chapelle de l’ancien Institut, réalisées de 1870 à 1872 par Napoléon Bourassa [1827-1916]. « Anne Bourassa, conservatrice des œuvres de son grand-père, tente de sauver de la destruction le plus grand nombre d’œuvres, mais c’est en vain qu’elle frappe à la porte des institutions publiques », écrit l’historienne Denise Robillard dans Les Merveilles de L’Oratoire (Fides, 2005). Les religieux de l’Oratoire acceptent dix fresques dont le découpage a été fait aux frais de madame Bourassa. Parmi les œuvres reçues, trois médaillons en grisaille retirés de la voûte de la nef mettent en vedette saint Joseph et la Sainte Famille : La Nativité, La fuite en Égypte et L’atelier de Nazareth.
À un promoteur de musée désirant acquérir les œuvres de son grand-père, Anne Bourassa rappelle avoir donné ces pièces aux religieux de Sainte-Croix. « Le fait de les avoir hébergées, recueillies alors que personne n’en voulait, leur donne sûrement le droit d’en disposer à leur gré. En retrouvant la correspondance échangée à cette époque, je constate que j’ai expressément fait don aux Pères des tableaux du plafond –ceux où figure saint Joseph. Ce sont ceux dont j’avais demandé le découpage. Je ne vous cache pas que je souhaite que les Pères de l’Oratoire y attachent assez de prix pour tenir à les garder », cite l’historienne Robillard.
Non seulement les œuvres ont été gardées; certaines ont été restaurées puis accrochées aux murs de la basilique. La fresque de forme octogonale de La Nativité a fait son entrée par les portes principales de la basilique en 2003, année du décès de celle qui a veillé au patrimoine artistique légué par Napoléon Bourassa. Puis le 10 juillet 2006, les deux autres fresques représentant l’enfance de Jésus auprès de Marie et Joseph ont été installées.
Il n’y avait plus de place à l’auberge de Bethléem pour la Sainte Famille… Cette histoire vous dit quelque chose… Comme il y a 2000 ans, elle a trouvé à se loger un peu à l’écart, dans la montagne…
Monsieur Bourassa, vous voilà donc à l’honneur sur le mont Royal et votre Sainte Famille surtout. À l’Oratoire Saint-Joseph, vos œuvres s’ajoutent à celles des Charlier, De Villiers, Daoust, Labouret, Prévost, Parent, Guardo, Plamondon, Laliberté qui disent Dieu à travers l’art. Toute une place!
 
lanativite_napoleon_bourassa_basilique_osj_redim_web
 
Photo: La Nativité, fresque de Napoléon Bourassa (Chapelle de l’Institut Nazareth, 1870-1872) Basilique de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal (2003), Montréal.
  • Nos hommages à la Place des Arts pour ses 50 ans de présence au cœur de la vie culturelle de Montréal.