Les débuts
Dès l’année de sa mort en 1937, l’anniversaire du frère André devient une occasion de commémoration. Cette année-là, les célébrations s’échelonnent sur deux jours, le dimanche 8 août et le lundi 9 août. Dès la première journée, 20 000 personnes sont présentes.
Pour l’occasion, la fameuse fresque d’Henri Charlier, que l’on peut encore voir derrière le tombeau et au-dessus de son ancien emplacement dans la Crypte, fut bénite. On inaugure également l’ancêtre de l’actuel chemin de croix extérieur sur la montagne, un rêve cher au frère André.1
Fig. 1 : Le tombeau du frère André et la fresque de Charlier, à l’époque où le tombeau était encore dans la Crypte.
Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal. 185-6.
Fig. 2 : La seconde station du premier chemin de croix sur la montagne.
Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal. 21-8.
Les deux années suivantes furent toutefois l’occasion d’une commémoration plus discrète afin de respecter les souhaits du frère André. On compte néanmoins plusieurs milliers de participants lors de la procession au flambeau en fin de journée, le 9 août 1939. 2
La neuvaine d’août 1940
Fig. 3 : Procession au flambeau en soirée. Bien que non datée, différents éléments sur la photo laissent à penser qu’elle a vraisemblablement été prise pendant la neuvaine d’août 1940. Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal. 235-1.
En 1940, Émile Deguire, nouveau recteur de l’Oratoire et bientôt postulateur de la Cause du frère André, décide de faire les choses en grand. Au lieu d’une simple journée, on organisera une première neuvaine commençant le 1er août et se terminant le jour de l’anniversaire du frère André, le 9 août.
Une mise en contexte historique s’impose. À l’époque, le frère André n’avait aucune reconnaissance officielle de l’Église catholique. Il n’était pas encore saint, ni bienheureux, ni même vénérable. Sa Cause n’était pas encore ouverte. Il n’était qu’un religieux récemment décédé, ayant fondé un grand sanctuaire. Selon les règles de l’Église, on ne pouvait ni le prier, ni lui faire une neuvaine. C’est pourquoi on parlait à l’époque d’une neuvaine d’Actions de grâces consacrée « à remercier la Providence de nous avoir donné ce grand bienfaiteur des âmes et des corps »3. Le père Deguire avait même écrit un article justificatif dans le numéro de juillet-août 1940 de la revue les Annales de Saint-Joseph afin d’expliquer cela.
Cette première neuvaine fut un véritable succès, au point de parfois prendre de court les organisateurs. Les grands mouvements catholiques de l’époque, comme la Jeunesse ouvrière catholique, avaient envoyé des délégués afin de participer aux célébrations. Après l’office de 15 h, la foule était invitée dans le chemin de croix de la montagne pour des exercices de prières. Le supérieur général de la Congrégation de Sainte-Croix, et ancien recteur de l’Oratoire, le père Albert Cousineau, avait même été invité à faire les prédications du soir. Les journées se terminaient par une procession au flambeau.
De ces journées de neuvaine, deux se distinguèrent, le dimanche 4 août et le vendredi 9 août. Le dimanche, dès 4 h du matin, des centaines de gens étaient déjà aux portes du sanctuaire. Au même moment, un pèlerinage à pied de 15 000 personnes, organisé par le journal La Presse partait du parc Lafontaine vers L’Oratoire. Une soixantaine de pèlerins est même partie du village de Howick à 9 h du soir la veille et a marché jusqu’à l’Oratoire afin d’arriver à temps pour la messe de 5 h du matin. Devant un tel enthousiasme, un autel extérieur a dû être improvisé afin de célébrer la messe en plein air.
Le jour de l’anniversaire du frère André fut le clou de la fête. Près de 200 personnes avaient passé la nuit précédente à prier. De 4 h à 10 h du matin, des messes se succédèrent sans interruption. À 10 h 30, il y avait dans la Crypte près de 800 personnes malades et des membres de leur famille, venues implorer une guérison. En soirée, ce sont 10 000 personnes qui se sont réunies afin de faire une immense procession au flambeau sur le terrain de l’Oratoire.4
Le cadeau d’anniversaire au frère André
Dans l’après-midi du 9 août, le nouvel évêque-coadjuteur de Montréal, Mgr Joseph Charbonneau, s’est déplacé à l’Oratoire afin d’offrir un cadeau d’anniversaire bien symbolique au frère André : la bénédiction de la première pierre du dôme et sa mise en place. À l’époque, le squelette du dôme était terminé, mais il restait toutefois la finition extérieure.5
Ainsi, à l’occasion du 95e anniversaire du frère André, une nouvelle étape vers le parachèvement du dôme commençait.
Fig. 4 : La bénédiction de la première pierre du dôme. Les Annales de Saint-Joseph, 1940, p. 262-263.
Quatre-vingt ans plus tard, le dôme n’est toujours pas terminé. Si l’extérieur est achevé, l’aménagement de l’intérieur attend encore. C’est ce qui justifie la campagne de financement actuelle « S’élever pour l’avenir » pour compléter l’œuvre du frère André en offrant du même coup la plus haute fenêtre sur Montréal.
Joyeux 175e anniversaire frère André!
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- Annales de Saint-Joseph, 1937, p. 327-328
- Annales de Saint-Joseph, 1939, p. 303
- Annales de Saint-Joseph, 1940, p. 260.
- Annales de Saint-Joseph, p. 258, 260.
- Annales de Saint-Joseph, p. 262-263