La sacra famiglia al museo
Le Musée de l’Oratoire est fier de participer à l’exposition Montréal à l’italienne au Musée Pointe-à-Callière de Montréal. Onze œuvres de notre collection, réalisées par des artistes d’origine italienne établis au Québec tels que Joseph Guardo, Guido Nincheri, T. Carli et E. Dini & Cie y sont présentées. Voici un aperçu de ce que vous pouvez y voir d’ici au 9 janvier 2022.
Les Italiens au Canada
Les premiers Italiens à venir en Amériques sont les grands explorateurs du XVe siècle. Mis à part quelques militaires démobilisés au pays, l’immigration italienne est presque nulle avant l’unification de l’Italie moderne qui se termine vers 1870. Cette période trouble amène plusieurs Italiens à chercher du travail sur le nouveau continent, mais leur périple sera temporaire. À partir du XXe siècle, un nombre plus important de travailleurs choisissent de s’établir avec leur famille au Québec.1
Ces immigrants sont généralement dotés d’une expertise dans les métiers manuels. Dans le domaine des arts, la présence des Italiens permet de combler un manque de main-d’œuvre dû à l’expansion des paroisses au Québec et à la demande de statuaire religieuse. Détenant un savoir-faire sans égal pour le travail du plâtre, leur expertise assurera l’expansion de plusieurs entreprises familiales au pays.
Au milieu du XIXe siècle, sont établis au Québec les Catelli, la Maison Baccerini & co. et T. Carli (Tommaso, communément appelé Thomas). Ces derniers collaborent et initient de grands artistes au métier de statuaire tels que Charles-Olivier Dauphin, Augustin Buteau, Olindo Graton et même Alfred Laliberté. Au XXe siècle, les Petrucci, Joseph Guardo, Bernardi & Nieri, Barsetti & Frères, etc. occupent aussi une grande part du marché.
Les collections muséales québécoises conservent de nombreuses œuvres de ces artistes d’origine italienne. Dans le cadre de l’exposition Montréal à l’italienne, présentée actuellement au Musée Pointe-à-Callière de Montréal, onze œuvres à caractère religieux de notre collection y sont exposées. Pour combler votre curiosité, je vous présente ici trois œuvres que j’apprécie particulièrement.
Des vitraux à la gloire de saint Joseph
Né en 1885 à Prato en Italie, Guido Nincheri (1885-1973) obtient son diplôme de l’Académie des beaux-arts de Florence en 1910. En 1913, son épouse et lui se rendent en Amérique pour leur voyage de noces. La guerre éclate et le couple décide de prolonger leur séjour à Boston. Le conflit se prolongeant, ils choisissent Montréal comme terre d’accueil. Guido trouve rapidement du travail comme dessinateur dans l’atelier d’Henri Perdriau. C’est là qu’il sera initié à l’art du vitrail. Il ouvre son propre studio en 1924, un petit atelier actif pendant plus de 45 ans. Surnommé le Michel-Ange de Montréal, Nincheri réalise aussi des décors peints selon la technique de la buon fresco dans de nombreuses églises.
Les trois grands vitraux figuratifs récupérés à l’ancienne chapelle du Scolasticat de Saint-Vincent-de-Paul à Québec en 2017.
Vue sur les deux vitraux exposés au Musée Pointe-à-Callière. 2017.34.1-3 © Musée de l’Oratoire
Les vitraux en prêt à Pointe-à-Callière sont commandés à Nincheri pour l’église Saint-Vincent-de-Paul à Québec en 1964. Suite à la fermeture de l’église en 1989 (démolie en 2010), les vitraux sont installés dans la chapelle du Scolasticat de Saint-Vincent-de-Paul à Québec. Ils sont retirés et offerts en don au Musée de l’Oratoire en 2017, lors de la vente du bâtiment par la congrégation. L’artiste y présente deux jalons historiques de la dévotion à saint Joseph au pays2 et notre sanctuaire y est identifié comme le Centre mondial de dévotion à saint Joseph. Le saint Joseph et l’Enfant entouré d’une gloire est vraisemblablement inspiré par la statue du maître-autel de la crypte de l’Oratoire3.
La Pietà, symbole riche de sens pour la Congrégation de Sainte-Croix
Comme précisé dans mon dernier blogue, Joseph Guardo (1901-1978) s’installe à Montréal vers la fin des années 1920. Par l’entremise du père Elphège-Marie Brassard, c.s.c., il réalise de nombreuses commandes pour l’Oratoire, dont la première semble être l’autel dédié à sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus installé dans la crypte depuis 1940.
L’œuvre en prêt au musée Pointe-à-Callière est d’un tout autre genre. Cette Pietà de grandeur nature est inspirée d’un dessin du père Brassard paru pour la première fois en 1934 dans les Notices sur la Congrégation de Sainte-Croix. Dans le cadre du Congrès marial d’Ottawa en juin 1947, la sculpture en plâtre est commandée à Guardo. Près de 117 communautés religieuses sont conviées à ce rassemblement visant à glorifier la Vierge Marie. C’est avec grand déploiement que l’Oratoire y expose les patronages de saint Joseph, les différentes réalisations de la Congrégation de Sainte-Croix et leur grande affection pour Marie4, plus particulièrement à Notre-Dame des Douleurs. La sculpture est ensuite installée à l’entrée du Scolasticat Notre-Dame de Sainte-Croix à Sainte-Geneviève5. À la vente du bâtiment, l’œuvre se retrouve à l’Oratoire.