L’inauguration d’une œuvre d’art publique

L’inauguration d’une œuvre d’art publique

Le 12 septembre 2025, l’Oratoire inaugurait la place de la Sainte-Famille ainsi qu’une œuvre d’art publique, tout en offrant un concert de carillon qui soulignait la restauration de ce dernier et ses 70 ans d’existence.

Issue d’un concours organisé dans le cadre de la Politique d’intégration des arts à l’architecture et à l’environnement du gouvernement du Québec en 2018, Rhizomes (fig. 1-2) est la première grande commande d’œuvre d’art réalisée par une femme à l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal. Ainsi, à l’instar de nombreuses autres institutions, l’Oratoire s’inscrit dans le mouvement de reconnaissance du talent, du travail et de la contribution des femmes à notre société.

Fig. 1-2 : Marie-France Brière, Rhizomes, 2024, Photos : Alexis Roy

Fig. 1-2 : Marie-France Brière, Rhizomes, 2024, Photos : Alexis Roy

Cela étant dit, la congrégation de Sainte-Croix, en vraie pionnière, avait déjà passé plusieurs commandes à une artiste que l’on considère aujourd’hui comme étant la première femme à avoir pratiqué professionnellement la sculpture au Québec, Sylvia Daoust, qui réalise le buste de frère André (fig. 3), des statues pour la chapelle du collège Saint-Laurent et la médaille du 75e anniversaire de l’Oratoire.

 

Fig. 3 Sylvia Daoust (1902-2024), Buste du frère André, 1937
Plâtre et peinture, 49,7 x 27,7 x 25,5 cm
Musée de l’Oratoire, 1973.199.1
Photo : Marie Bernatchez

 

 

Mais revenons à Marie France Brière – qui poursuit la lignée de Sylvia Daoust – et à son œuvre Rhizomes.

L’œuvre prend tout son sens lorsque que l’on sait qu’elle est inspirée d’un objet présenté dans l’exposition « Saint-Joseph aime Montréal » qui s’est tenue au Musée de l’Oratoire du 28 mai 2017 au 2 avril 2018. L’objet en question, désuet, modeste et sans prétention, est le cordon de saint Joseph (fig. 4). Il faut remonter au milieu du XVIIe siècle où une religieuse augustine d’Anvers, sœur Élisabeth, guérit d’atroces souffrances à la suite de prières effectuées grâce à un cordon de 7 nœuds (représentant les sept joies et les sept douleurs de saint Joseph) de sa propre confection. A la fois symbole et prière, ce cordon de dévotion, lié au soulagement de souffrances physiques, n’est pas étranger à la vocation d’origine du sanctuaire fondé par le thaumaturge du mont Royal en 1904.

 

Fig. 4 : Sœurs de Saint-Joseph de Saint-Vallier, 2017
Cordon de saint Joseph, 2017
Fibre, 105 cm
Musée de l’Oratoire, 2021.42
Photo : Marie Bernatchez

 

 

La lauréate, Marie-France Brière, explique : « Je présente ici une œuvre qui invite au déplacement à travers une architecture relationnelle. C’est un petit objet de dévotion remarqué dans une vitrine du musée de l’Oratoire, une corde blanche avec des nœuds qui sera le principal déclencheur de ma démarche pour ce projet. Ce modèle rhizomique fait surface, les nœuds se transforment en bulbes ou tubercules, l’organisation est pluridirectionnelle et polymorphe. De l’idée de la faille et de l’excavation du rocher surgit cette veine-câble ronde et souple traversée de sept figures-nœuds, la plupart en apesanteur ».

La sculpture contemporaine revêt d’indéniables qualités artistiques. Ses formes courbes et arrondies lui confèrent une élégance certaine. Le mariage du bronze et de l’inox crée une rupture. Soudainement le miroir reflète le ciel et déconcerte le spectateur. Enfin, son occupation de l’espace joue un rôle à la fois ornemental et fonctionnel, puisque l’œuvre a été réalisée pour que les pèlerins et les visiteurs puissent s’y asseoir.

Le titre de l’œuvre, Rhizomes, qui fait référence de prime abord à la flore, n’est toutefois pas sans évoquer, de façon métaphorique, le tissu et l’étendue du patrimoine religieux au Québec, où chaque village, chaque ville est marquée par la présence d’un oratoire, d’une chapelle, d’une église, d’un sanctuaire, d’une basilique, d’une cathédrale, d’un carillon, le tout étant lié les uns aux autres.

Cette œuvre fait donc le lien entre la religion, l’art et la nature, trois aspects des plus importants du sanctuaire, trois raisons pour lesquelles le site attire autant de visiteurs.

Par ailleurs, l’inauguration de Rhizomes a été l’occasion de présenter le carillon (fig. 5-6), puisque ces deux œuvres monumentales sont côte à côte et constituent les points phares de la place de la Sainte-Famille. Les deux œuvres mettent en valeur le travail d’un matériau noble, le bronze, et une association peut être faite entre l’art et la musique qui jouent tout deux des rôles importants dans la liturgie et la dévotion.

 

Fig. 5-6 : Le carillon est réalisé et restauré par la Fonderie Paccard (France); le campanile est conçu par la firme d’architecture Lemay (Québec), Photos : Émie Morneau-Viel et Alexis Roy

Fig. 5-6 : Le carillon est réalisé et restauré par la Fonderie Paccard (France); le campanile est conçu par la firme d’architecture Lemay (Québec), Photos : Émie Morneau-Viel et Alexis Roy

 

Enfin, soulignons, une fois de plus, la contribution féminine à la nouvelle place de la Sainte-famille, puisque, sans oublier Marie, deux autres femmes étaient mises à l’honneur le 12 septembre 2025, soit la sculptrice Marie-France Brière (fig. 7) et la carilloniste Andrée-Anne Doane (fig. 8), et nous les en remercions.

 

Fig. 7 : Marie-France Brière lors de son discours d’inauguration, 12 septembre 2025, Photo : Émie Morneau-Viel

 

Fig. 8 : Andrée-Anne Doane lors de sa présentation du carillon, 12 septembre 2025, Photo : Émie Morneau-Viel