Un adieu intime à saint frère André

Il a souvent été fait mention de l’ampleur des funérailles qui ont suivi le décès de frère André, le 6 janvier 1937. Pendant toute une semaine, des centaines de milliers de personnes ont défilé devant le cercueil en chapelle ardente de la crypte de l’Oratoire et ont assisté aux obsèques. La foule était si dense que l’attente pour rejoindre le cercueil pouvait prendre jusqu’à quatre heures. Et on ne s’attardait pas longtemps une fois devant le corps de frère André. Les récits de l’époque font état de 110 visiteurs à la minute ! 1

Foule devant crypte - chapelle ardente SFA

Figure 1. Photographie de la foule devant la crypte de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal lors de la chapelle ardente de frère André.
Photographe inconnu. Janvier 1937.
Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, 12-1.

Deux funérailles seront célébrées. Une première le 9 janvier à la cathédrale Marie-Reine-du-Monde de Montréal et une seconde le 12 janvier à la crypte de l’Oratoire Saint-Joseph.

Foule lors de la chapelle ardente SFA

Figure 2. Vue de la foule lors de la chapelle ardente. Photographie prise du toit du Collège Notre-Dame. Photographe inconnu. Janvier 1937.
Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, 12-11a.

Dans les jours qui ont suivi le décès, le 9 janvier au soir, quelques amis intimes du frère André se rassemblent afin de lui offrir un adieu particulier. Loin des foules, trois hommes, Paul Corbeil, R.H. Deschamps et T.O. Grandmaison se présentent à la résidence du père Lucien Pagé, c.s.v. [Clercs de Saint-Viateur], alors supérieur de l’Institut des Sourds-Muets. Ils désirent écrire une lettre, « comme on écrit à un ami dont, pour un temps, la distance sépare » 2. Ils sollicitent l’aide du père Pagé pour mieux exprimer leurs sentiments. Le lendemain matin, 10 janvier, la lettre était prête.

Lettre du père Lucien Pagé, c.s.v.

Figure 3. Lettre du père Lucien Pagé, c.s.v., au père Alfred Laplante, c.s.c. 22 janvier 1952.
Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, 13.07.00/E.6-1-3

Lettre fac-simile de l'adieu à frère André

Figure 4. Lettre fac-simile de l’adieu à frère André, lue le 10 janvier 1937.
Archives de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, 13.07.00/E.6-1-3

La lecture de la lettre a lieu le jour même à minuit. Ceux qui parmi les amis le pouvait étaient présents et formèrent une couronne autour du cercueil de frère André. On y sent toute l’amitié et l’admiration de ces hommes qui ont accompagné le saint frère André. En voici quelques extraits :

« Bon et fidèle serviteur de saint Joseph, en présence de vos restes vénérés, vos humbles amis viennent vous présenter l’hommage de leur fraternelle affection et de leur profonde gratitude.

[…] vous avez passé en faisant le bien aux habitants de notre ville, de notre province, de notre pays et des cinq parties du monde.

[…] Parfois nous étions malheureux, vous avez compati à nos épreuves. Nous étions ans la peine, vous avez pleuré avec nous. Nous étions malades, vous nous avez visités dans nos demeures et vous nous avez guéris. […] Dans vos visites aux malades nous avons vu nos concitoyens courir sur votre passage et vous demander de prier saint Joseph pour eux.

[…] Pour tous ces bienfaits reçus par l’intercession de saint Joseph, que vous nous avez conseillé de prier en toute simplicité et confiance, nous venons vous exprimer notre reconnaissance et vous offrir nos hommages de gratitude. Vos humbles et fidèles amis vous demandent d’intercéder pour eux auprès du bon saint Joseph ; ils vous supplient de leur continuer les bienfaits de ce puissant protecteur après votre entrée dans le ciel. »

Après la lecture, une copie de la lettre a été déposée dans le cercueil du saint frère André. Cependant, un exemplaire avait été remis à La Presse qui en faisait la diffusion dans l’édition du lundi 11 janvier 1937. Quelques années plus tard, une copie dactylographiée avec les signatures autographes a été remise aux archives par M. Joseph Cantin.

_________________________________________

  1. Journal La Patrie, 13 janvier 1937 (dans Catta, 1965, p. 914)
  2. Catta, 1965, p. 934