Une dévotion aux racines françaises

C’est en 1636 à La Flèche, en France, que deux laïcs, Jérôme Le Royer de La Dauversière et Marie de la Ferre, fondent la communauté des Filles Hospitalières de Saint-Joseph pour servir les malades de l’Hôtel-Dieu. La nouvelle communauté est dédiée à la Sainte Famille sous le nom et la protection spéciale de saint Joseph, une dévotion particulièrement importante pour Jérôme Le Royer. En 1671, elles adoptent la vie cloîtrée et les voeux solennels et sont, alors, des « religieuses ».

Ce culte à saint Joseph accompagne Jeanne Mance, Paul de Chomedey de Maisonneuve et les premiers colons à Ville-Marie.  La célébration de la première fête de saint Joseph, à Ville-Marie, le 19 mars 1643, est un jour de liesse. Jeanne Mance verra le dernier acte de sa vie administrative scellé, tout comme son testament, d’un sceau à l’effigie de saint Joseph.

Le 2 juillet 1659, trois Filles Hospitalières de Saint-Joseph de La Flèche : Judith Moreau de Brésoles, Catherine Macé et Marie Maillet se trouvent au port de La Rochelle, recevant la dernière bénédiction de Jérôme Le Royer avant leur départ pour le Canada. Ce sont elles qui transmettront aux générations d’Hospitalières canadiennes l’esprit de la Congrégation, dont la caractéristique est la dévotion à leur glorieux Père saint Joseph.

Marie Morin, la première vocation canadienne, née à Québec, le jour de la fête de saint Joseph en 1649, fait profession sous les auspices de ce grand Saint, en 1665. Les Annales, qu’elle rédigea sur les premières années de Ville-Marie, nous offrent de nombreux exemples de la protection de ce bon Père.

Un saint pour l’Hôpital

Notre Hôtel-Dieu de Montréal émerge donc comme centre de rayonnement du culte à saint Joseph. Depuis l’origine, il y a toujours eu une salle dédiée à Saint-Joseph, la salle des hommes. Monseigneur Ignace Bourget, deuxième évêque de Montréal, affirme, dans une lettre écrite de Paris, le 8 septembre 1855, que ce fut pendant les quatre années qu’il passa avec Monseigneur Jean-Jacques Lartigue, à l’Hôtel-Dieu, qu’il sentit imperceptiblement s’allumer dans son cœur les premières étincelles de la dévotion à saint Joseph.

« Maintenant, écrit Mgr Bourget, tout vous fait un devoir bien légitime de vous dévouer particulièrement à l’extension de cette si douce et aimable dévotion. Vos premières Mères passèrent par les rudes épreuves – que vos chroniques ont consignées – pour en être les apôtres. Vos anciennes sœurs en furent les heureuses héritières et les gardiennes fidèles ». Nos annales rapportent des guérisons importantes de malades, obtenues de saint Joseph.

La protection de saint Joseph fut accordée, de façon spéciale, en 1860, au nouvel Hôtel-Dieu, lors des travaux qui se déroulèrent avec une rapidité étonnante, et des faveurs visibles même au plan matériel.

« Au moyen de votre grand hôpital et de votre belle église, écrit de Rome, Mgr Bourget, le 17 mai 1882, vous avez maintenant, à votre disposition, plus de facilité pour répandre le culte de saint Joseph. Ne cessez pas d’en parler à vos chers malades… »

Suite à l’année jubilaire consacrée au saint Patriarche par Benoît XV, en 1920, une statue de saint Joseph de dix pieds de hauteur est placée sur le toit de l’hôpital en 1924.

Le 19 mars 1942, année du tricentenaire de Montréal, on organisa une procession dans tout l’hôpital avec une antique statue de saint Joseph; chant d’hymnes et de cantiques sur tout le parcours; récitation des Sept Douleurs et Allégresses de saint Joseph. Dans l’Hôtel-Dieu de 1942 comme dans le minuscule hôpital de 1645 saint Joseph occupe la place qui est sienne : celle du « maître de la maison ».

Saint Joseph, un compagnon fidèle au XXIe siècle

Même si l’expression de leur dévotion diffère, les Hospitalières continuent d’honorer saint Joseph. Chaque mercredi est souligné comme un jour qui lui est dédié par des prières spéciales. Les dévotions traditionnelles sont maintenues. On célèbre de façon particulière le 19 mars, fête de saint Joseph et patron de la congrégation. Pour l’occasion, sept pèlerinages hebdomadaires mènent aux divers endroits de la maison où se trouve l’image de saint Joseph.

La dévotion actuelle prend des modalités adaptées à la vie communautaire : neuvaine à la chapelle, prière d’intercession ou chant à saint Joseph le 1er mercredi du mois, à Vêpres.

Nos projets, tant matériels que spirituels, lui sont confiés. Et toujours il répond à notre confiance. Toute notre reconnaissance envers nos devancières qui ont conservé et nous ont transmis le flambeau de cette forte dévotion.

 

Sr Nicole Bussières, rhsj

Le 20 juin 2024

D’après l’article : « La dévotion à saint Joseph : perle précieuse de notre patrimoine communautaire », par Sr Thérèse Payer, rhsj. 1980.